I - LCI 17 février 2024
Avec la mort de Navalny et la victoire sur le terrain Avdiivka, force est de constater que Poutine est dans une situation aujourd'hui avantageuse car il n'a plus d'opposants politiques et il n'a plus pour l'instant de résistance sur le terrain à Avdiivka Mais c'est peut-être provisoire.
1 - L'évolution de la campagne de désinformation russe
La campagne de désinformation russe en Occident existe depuis très longtemps, depuis que Poutine est Premier ministre. (Mais longtemps on n’a pas voulu la voir). À l'époque par exemple tout le monde prenait pour un fou Alexandre Livinenko (l'espion qui a été tué au polonium) parce ce que ce qu'il racontait paraissait tellement invraisemblable : il a été un des premiers à avoir parlé de cette désinformation en Russie quand le FSB a fait sauter des immeubles à Moscou pour faire passer ça pour des Tchétchènes.
Cette désinformation ne me semble pas un degré tellementplus fort ; c'est simplement un peu plus c'est plus visible aujourd'hui.
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Les présidents Macron et Biden se réveillent alors même que cette tradition que ce soit l'empoisonnement ou les cyberattaques est une tradition qui existe depuis longtemps en Russie. Mais les Occidentaux étaient endormis par la Russie qui (désinformait) nos élites en pénétrant nos médias en sponsorisant des ONG d'information .
La réponse politique de l'Occident (vient de monter d’un degré) : on s'est aperçu effectivement que ces deux derniers mois le discours de Poutine a été autrement plus agressif qu'il ne l'avait été jusqu'à aujourd'hui : il menace l'Occident, il menace les États baltes. Regardez ce qui se passe avec la Première ministre estonienne (vis-à-vis de laquelle Poutine a lancé un véritable avis de recherche pour destruction de monuments à la gloire de l'Arlée rouge !). Le récit politique de Joe Biden et du président Macron, est (maintenant) à la hauteur des nouvelles menaces qui ont été évoquées récemment notamment cette guerre nucléaire dans l'espace.
2 - Aggravation du danger nucléaire russe ?
Mercredi 14 février de hauts responsables américains annoncent l'apparition d'une nouvelle menace pour la sécurité les médias américains et citent les uns après les autres des sources anonymes qui toutes évoquent des capacités militaires russes extrêmement préoccupantes. Dans un communiqué de presse l'élu républicain Mike Turner déclare ceci « je demande au président Biden de déclassifier toutes les informations relatives à cette menace afin que le congrès le gouvernement et nos alliés puissent débattre des actions nécessaires pour y faire face. » Le lendemain, on est jeudi à Moscou qui parle d'accusations infondées. Je les cite : « cela s'inscrit dans la tendance de ces 10 dernières années où les Américains se livrent à des inventions malveillantes et nous attribuent toutes sortes d'actions ou d'intention qui ne leur conviennent pas » Ce sont ici les mots du vice-ministre des Affaires étrangères.
De quoi parle-t-on exactement ? la Russie aurait développé des moyens de déstabilisation nucléaire d'origine spatiale. Elle serait donc en train de développer une sorte d'arme nucléaire capable de détruire des satellites dans l'espace. Et ce qui est intéressant, c'est que quelques jours plus tard, on est déjà samedi 17 février on entend des experts parler de ce qu'ils connaissent ; à savoir l'espace. Je prends notamment l'exemple de Blandine Bowen professeur à l'université de Leicester qui, elle, minimise les annonces. Elle dit en fait que c'est la forme la plus simpliste de la guerre dans l'espace, une bombe qui menace des satellites en orbite. Ce n'est absolument pas inédit : les États-Unis eux-mêmes s'y exercent depuis 1957. La Chine l'Inde ou la Russie ont montré qu'ils étaient eux aussi capables de faire exploser depuis la terre un objet en orbite. Alors là on peut se poser la question : pourquoi dès lors créer une bombe spatiale si l'armement conventionnel tiré depuis le sol peut suffire pourneutraliser des satellites ? Et elle ajoute ceci : la Chine et les États-Unis ont des programmes avancés de satellites militaires manœuvrables dans le but de détruire d'autres satellites. Cela n'a rien d'un Game changer. La grande nouvelle c'est Emmanuel Macron lui-même qui prend la menace assez au sérieux pour demander aux Russes des explications mais les Américains eux aussi s'expriment et il est clair qu'ils semblent inquiets.
3 - Guerre en Ukraine : Emmanuel Macron appelle à un «sursaut collectif» face au «changement de posture» de la russie
C News le 16/02/2024
Lors d'un discours particulièrement grave en présence de son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, donné ce vendredi 16 février à l'Élysée, Emmanuel Macron a appelé la communauté internationale à un «sursaut collectif», face à un «changement de posture» de Vladimir Poutine.
Un «changement de posture» de la Russie qui «exige un sursaut collectif» de l'Europe comme de la communauté internationale. Tels sont les mots prononcés par Emmanuel Macron ce vendredi, lors de la signature d’un accord bilatéral de sécurité entre l’Ukraine et la France, qui prévoit notamment que cette dernière verse «jusqu'à trois milliards d'euros» supplémentaires d'aide militaire à Kiev.
Lors de son discours, donné à l’occasion d’une conférence de presse avec son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président de la République a tout d’abord rappelé : «Le régime du Kremlin a agressé, il y a deux ans,l'Ukraine, pays européen».
Celui-ci a également affirmé, l’air grave, que Moscou avait «franchi plusieurs seuils» dans ses cyberattaques, y voyant «une volonté d'agression», et que «le régime du Kremlin [avait] intensifié et durci ses agressions contre notre pays sur le plan de la désinformation et sur le plan cyber».
« Ce sont des formes de conflictualité », a jugé le chef de l’État. Depuis le début du conflit, le nombre d’intrusions et d’attaques cybercriminelles en provenance de la Russie à l’encontre de la
France a en effet fortement augmenté.
LA MENACE D'ARMES NUCLÉAIRES DANS L'ESPACE
Faisant référence aux «inquiétudes exprimées ces derniers jours sur le possible déploiement par la Russie d'armes nucléaires dans l'espace», évoquées par Michael Turner, président républicain de la commission du renseignement de la Chambre des représentants, Emmanuel Macron a estimé que « laRussie [devait] sans tarder donner des explications ».
Emmanuel Macron a par la suite exhorté la communauté internationale à prendre la mesure de la gravité des agissements du Kremlin. «Très clairement, il y a besoin d'un sursaut européen, mais plus largement de nos alliés, de nos partenaires et de la communauté internationale», a insisté le président français, avant d’ajouter que «La Russie de Vladimir Poutine [était] devenue un acteur méthodique dela déstabilisation du monde».
Et d’avertir : «Si on voit les choses advenir, si on voit une nouvelle phase s'ouvrir, nous devons avoir la lucidité d'ouvrir une phase de réflexion stratégique et opérationnelle nouvelle. C'est ce que souhaite la France», a encore appelé Emmanuel Macron.
4 - Détails sur les deux accords militaires signés avec l’Ukraine
4 - 1 : Macron et Zelensky ont signé un accord franco-ukrainien de sécurité
Par A.V.M. avec AFP
Publié le 16/02/2024
Emmanuel Macron et son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky ont signé ce vendredi soir à Paris un accord bilatéral de sécurité censé garantir un soutien civil et militaire dans la durée à l'Ukraine en pleine guerre avec la Russie. Dans ce texte conclu pour "une durée de dix ans", la France s'engage à fournir en 2024 "jusqu’à 3 milliards d'euros" d'aide militaire "supplémentaire" à Kiev, après un soutien qu'elle chiffre à 1,7 milliard en 2022 et 2,1 milliards en 2023. L'accord prévoit "la fourniture d'une assistance globale à l'Ukraine" pour "le rétablissement de son intégrité territoriale dans ses frontières
internationalement reconnues", "la dissuasion active et les mesures à prendre face à toute nouvelle agression" de la Russie, ainsi qu'un "soutien" à l'adhésion de Kiev à l'Union européenne et à "l'interopérabilité avec l'Otan".
4 - 2 : L’Allemagne et l’Ukraine signent un accord bilatéral de sécurité
Le chancelier allemand Olaf Scholz et le président ukrainien Volodymyr Zelensky ont signé vendredi à Berlin un accord de sécurité entre leurs deux pays pour garantir à l’Ukraine un soutien durable. Cet accord porte sur "les engagements de sécurité et le soutien à long terme" de l’Ukraine, avait indiqué plus tôt la chancellerie allemande. A quelques jours du deuxième anniversaire de l’invasion russe et après l’échec de sa contre-offensive de 2023, l’Ukraine est face à de multiples défis : les forces
russes à l’offensive, l’aide militaire américaine bloquée, manque d’hommes, d’armes et de munitions.
Ce vendredi matin, l’institutde recherche allemand Kiel Institute estimait que l’Union européenne devrait doubler son aide militaire à l’Ukraine pour pallier la défaillance des
Etats-Unis, dont une nouvelle enveloppe est bloquée depuis des mois au Congrès. "Il est hautement incertain que les Etats-Unis envoient de l’aide militaire supplémentaire en 2024", estime l’institut, qui recense l’aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l’Ukraine depuis l’invasion russe le 24 février 2022.
II - Interview de Thierry Wolton : « Nous avons été aveugles » Propos recueillis par Thomas Mahler. L'Express n° 3788 du 8 février 2024 (page 21et svt).
1 - « Xi jing ping, comme avant lui tous ses prédécesseurs, se réclament du marxisme léninisme, il faut le croire », écrivez-vous. Nous sommes-nous illusionnés au sujet du régime chinois ?
Thierry Wolton : Ce qui cimente une coalition, c'est un ennemi commun. En l'occurrence, l'Occident. () La Chine, il est vrai, profite de la Russie. Cette dernière étant sous embargo, ses matières premières se dirigent désormais vers l'est, vers la Chine et l'Inde, principalement. La Chine dispose de peu de pétrole et dépend beaucoup descouloirs maritimes pour s'approvisionner, ce qui est une faiblesse stratégique.La Russie est un parfait réservoir pour elle. Ce qui ne veut pas dire que Poutine ne profite pas lui aussi de cette coalition, la Corée du Nord pouvant lui servir de boîte noire pour se faire livrer des armes chinoises. Pourl'instant la coalition fonctionne très bien. De surcroît, la Chine et la Russie ont des revendications similaires : sécuriser leur étranger proche, Taïwan et l'Ukraine. Cette coalition n'a rien d'opportune, il y a une vraie conjonction idéologique. Poutine, formé par le système communiste, et XiJinping ont des logiciels communs ; bien plus qu'avec le régime islamiste de Téhéran.
2 - Dans son dernier livre Emmanuel Todd évoque la défaite de l'Occident.
Thierry Wolton : La grande force des démocraties occidentales, c'est leur souplesse. Changer de dirigeant tous les 4 ou 5 ans, face à des dictateurs qui conservent leur poste durant 20 ans, peut sembler être une faiblesse, mais c'est aussi un atout dans la capacité d'adaptation face à l'adversité. Un pays totalitaire est rigide à tout point de vue, en matière de direction politique comme d'idéologie. () S'il y avait un affrontement global entre les dictatures menées par Xi Jinping et Poutine et
les démocraties libérales, ces dernières auraient de meilleures chances de
l'emporter.
3 - Ces régimes autoritaires ne sont-ils pas bien plus faibles qu'on ne le pense souvent ?
Thierry Wolton : Sous Mao, Pékin parlait de tigre de papier à propos des États-Unis. Selon moi le régime chinois actuel est un dragon de papier. () Personne n'avait prévu l'effondrement de l'Union
soviétique, et pourtant il a eu lieu. La Chine a aujourd'hui d'énormes difficultés : démographiques avec un vieillissement rapide, et économique, avec l'accroissement des coûts de main d'œuvre, le chômage des jeunes ou l'endettement … vous remarquerez que plus personne ne parle sur le fait que le PIB de la Chine va dépasser rapidement celui des États-Unis. On en était persuadé dans les années 2010.
L’économie de la Russie est sous la coupe de prédateurs, les oligarques, qui pompent ses ressources naturelles pour s'enrichir. () Alors qu'au fin fond du Caucase, c'est toujours la misère, avec des infrastructures qui datent des années 1950. Le peuple ne compte pas dans ce type de régime,c'est une variable négligeable.
La Grande Guerre patriotique est le seul fait de gloire dont Poutine peut se réclamer dans le lourd bilan du communisme. Et qu'importent les 27 millions de morts durant la 2nde guerre mondiale, dus à l’impéritie du régime stalinien et à sa négligence totale de la vie humaine. En France, quand on perd un militaire, on le décore aux Invalides. Quand la Russie perd 250 000 hommes en Ukraine, c'est le silence total.