Sept figures de l'antiaméricanisme

 

Les 4 foncions que remplit l'antiaméricanisme

· L'antiaméricanisme affaiblit l'Occident

Sept figures de l'antiaméricanisme

Article de Benoît Richard Sciences Humaines N° 165 - Novembre 2005

S.Meunier, « Anti-Americanisms in France », French Politics, Culture & Society, vol. XXIII, n°2, été 2005.
https://www.lemonde.fr/archives/article/2002/01/06/en-france-l-antiamericanisme-structure-apparait-minoritaire-et-politique_4219328_1819218.html

 

La France est réputée pour son antiaméricanisme. Pourtant, les sondages montrent que les Français n'ont pas plus de sentiments antiaméricains que les autres Européens. En fait, la France se distingue surtout par sa critique du leadership états-unien et par savolonté de construire une Europe indépendante.

Politiste à l'université de Princeton, Sophie Meunier distingue sept types d'antiaméricanisme :

1.     le premier, souverainiste, est enraciné dans le ressentiment face à la perte de statut de grande puissance. A gauche comme à droite, on trouve de nombreux politiciens pour souligner l'importance de ne pas perdre le contrôle de la souveraineté nationale, quitte à contrecarrer les Etats-Unis.

2.     Ledeuxième, dit d'héritage, provient de ressentiments accumulés au fil dessiècles. Il se manifeste de façon récurrente sous la forme de critiques envers les Etats-Unis, soit isolationnistes, soit impérialistes, auxquels on ne peut pas faire confiance.

3.    Le troisième, libéral, partage les idéaux de l'Amérique mais lui reproche son hypocrisie en constatant le décalage avec les actes.

4.     Lequatrième, élitiste, affiche son dédain envers la culture états-unienne. C'est celui qui a « laplus longue histoire et la plus grande virulence en France », dit la politiste.

5.     Lecinquième, nostalgique, voit derrière la disparition des bistrots d'antan l'ombre maléfique de McDonald's. Il attribue la déshumanisation du mondeà l'influence yankee.

6.     Le sixième, social, « l'un des plusrépandus », se concentre sur l'ordre social et les valeurs. Ilcritique une société inégalitaire et violente. Il se méfie aussi du multiculturalisme et de la religiosité américaine qui contredisent le modèle républicainfrançais.

7.     Ledernier, enfin, qui est aussi le plus récent, est celui du radicalisme musulman et participerait du « clash descivilisations ». Selon la politiste, il serait le fait de jeunes d'origine nord-africaine radicalisés et non intégrés dans la société française.

La chercheuse explique la multiplication des formes d'antiaméricanisme en France par les bénéfices
politiques qu'il permet de retirer.

L'antiaméricanisme remplit en effet quatre grandes fonctions :

1.     Premièrement ,il permet de construire une identité par défaut en Europe. Si personne ne sait ce que c'est qu'être européen, tout le monde s'accorde sur un point : c'est ne pas être américain !

2.    Deuxièmement, l'antiaméricanisme sert à discréditer des réformes vues comme des importations US.

3.    A contrario, les Etats-Unis servent de bouc émissaire pour justifier certaines mesures impopulaires.

4.     Enfin, l'antiaméricanisme permet de détourner l'attention des électeurs de problèmes internes. Bien sûr, dans la pratique, la frontière est souvent floue entre les dissensions inhérentes au débat politique et les véritables préjugés antiaméricains.